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9 octobre 2010 6 09 /10 /octobre /2010 16:05

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Frères et sœurs,

 

 

                   Etre lépreux, être tenu à distance, être montré du doigt, voir des gens passer sur le trottoir d’en face, se sentir évité, nous devinons quelque peu la souffrance et l’humiliation de ces personnes affectées par cette maladie. Etre lépreux, à l’époque de Jésus, c’était en quelque sorte être un homme fini, un mort parmi les vivants, un exclu de la société. Dix lépreux donc : de quoi faire fuir toute la population d’un village.

Une petite remarque tout d’abord. Lorsque l’Evangile nous raconte l’histoire de la rencontre des aveugles, des paralytiques, des boiteux, des lépreux qui crient vers Jésus, nous lisons tout bonnement, nous cherchons souvent, et en premier lieu, à trouver le sens spirituel de leur démarche. Et  nous ne prenons pas, le plus souvent, le temps de les regarder, de compatir à leur souffrance et à leur handicap. Compatir vient du latin, cum-patere (= souffrir avec..) Je dis cela parce que, ayant été moi-même ces mois derniers, handicapé,(comme vous le savez) avec une jambe cassée, je ne peux pas, (je ne peux plus) ne pas compatir à la souffrance (je ne sais comment dire), au supplice, à l’affliction, à l’amertume, à l’épreuve d’une personne qui marche ou qui sautille avec des béquilles, ou qui est cloué dans une chaise roulante. Voir un malade, lépreux ou pas, le regard chrétien envers celui-ou celle-là ce doit être un regard de compassion. Compassion : souffrir avec…

 Dans ce passage d’évangile, il nous est donc raconté l’histoire de dix lépreux. Alors ces lépreux prennent un risque. Ils s‘avancent vers Jésus, malgré l’interdiction que leur impose la loi de l’époque, et ils se mettent à crier : « Jésus, Maître prends pitié de nous. » Ils crient. Ils ont soif de lumière, de vie, d’amour, de relations normales. Ils ont peut-être deviné que Jésus n’était pas comme les autres. Les apôtres ne devaient pas se sentir à l’aise en voyant venir ces malades. Pour Jésus au contraire ces hommes humiliés étaient l’image de notre humanité, malade du péché, errant et vivotant sans but, dans la solitude et le désespoir.

Nous connaissons la réponse de Jésus : « Allez vous montrer aux prêtres ». Il faut savoir en effet, qu’à l’époque de Jésus également, selon la prescription du Livre du Lévitique, il revenait aux prêtres de constater la guérison, et d’accomplir la réintégration officielle dans la communauté. Car ces malheureux étaient exclus de la communauté, de peur de contaminer tout le monde. A l’époque, ne l’oublions pas, il n’y avait d’antibiotiques. Par conséquent, le fait de leur dire d’aller se montrer aux prêtres, c’était déjà une promesse de guérison, une guérison commencée. Or sur la route, tandis qu’ils s’avancent, guéris, un seul revient sur ses pas pour dire merci. Notez bien que st. Luc ne dit pas que les neuf autres ont été des ingrats pour n’être pas revenus. Pas du tout ! Ils sont sans doute allés jusqu’au temple de Jérusalem. Mais l’évangéliste note que, un seul a eu l’intuition que Jésus n’était pas n’importe qui, qu’il était plus que le temple, et que c’est vers lui qu’il fallait aller. Jésus l’approuvera. C’est donc sur ce comportement  du Samaritain qui fait demi-tour, c’est là-dessus que l’Evangéliste insiste pour nous faire une catéchèse. Il veut nous faire comprendre quoi ?  Que désormais le seul temple où l’on peut rendre gloire à Dieu, c’est auprès de Jésus et en Jésus..C’est en lui, avec Lui et en Lui, que nous pouvons rendre toute gloire à Dieu

Ainsi donc ce Samaritain, cet étranger, ce païen, apparaît-il ici comme le premier d’une longue chaîne, celle de tous les païens qui paradoxalement vont comprendre plus rapidement que les Juifs qui est Jésus. Plus rapidement aussi, ils entreront dans l’Eglise parce qu’ils auront su reconnaître en lui Jésus le sauveur.

Mais  l’histoire de ce dix lépreux que Jésus guérit, n’est-ce pas un peu aussi le récit de notre propre comportement ? Et ceci à deux niveaux.

Par ex. Il y a des images, des souvenirs, des émotions qui s’imposent à nous quand nous essayons d’identifier des personnes qui ont eu de l’importance dans notre vie : parents, professeurs, amis et bien d’autres personnes encore, qui nous ont aidé à des moments critiques. En pensant à tout ce monde, à qui nous devons tant et tant de choses, nous nous sentons peut-être un peu coupable de ne pas leur dire plus souvent merci. Cela leur ferait tellement plaisir s’ils savaient que nous reconnaissons que c’est grâce à eux qu’on est devenu ce que nous sommes. Finalement ce ne serait pas très compliqué de le leur dire ou de le leur faire savoir. Mais pour Dieu comment faire ?

Quelqu’un disait : « Celui à qui j’ai le plus difficulté à dire merci : c’est Dieu. J’ai beau dire que je lui dois tout, mais ce que je fais en signe d’action de grâces et ce que je dis ne me semble très insuffisant ».  Si ma foi me pousse à servir les autres, à m’engager, à  aimer même quand c’est difficile, à  pardonner même quand c’est difficile, c’est grâce à Dieu. C’est par la grâce de Dieu que j’arrive à faire tout cela. Et tout cela n’est pas une illusion, car en faisant un retour sur soi-même, on s’aperçoit que le dépassement dont on a été capable vient de plus loin que soi, de plus haut que soit. Alors c’est par Jésus que je dis merci,  c’est en Jésus et avec Jésus que je dis à Dieu honneur, louange et action de grâces. Rien est au-dessus de cela.

Il y a autre chose encore. Lorsque nous sommes dans le besoin nous savons trouver le chemin de la prière, et crier : « Jésus Maître prends pitié ! » Et nous sommes exaucés. Or parmi les dix lépreux exaucés,  un seul va entendre « relève-toi, ta foi t’a sauvé.. » Il y a plusieurs chemins vers Jésus : un chemin nous tourne vers lui quand nous sommes dans le besoin ; et un autre nous ramène à lui pour le reconnaître. Beaucoup ne parcourent que le premier. Ils tirent bénéfice d’une grâce reçue. Et c’es tout ! C’est un premier pas. Dieu n’est pas avare de ses dons. Il ne le mesure pas à notre gratitude. Cependant d’autres vont plus loin et deviennent ses disciples.

Vivant dans un monde où l’utilité, la productivité, l’efficacité sont perçues comme des valeurs de première importance, nous risquons, nous les chrétiens, d’être aussi contaminés par cette mentalité du rendement, du profit, de la rentabilité: « la Messe à quoi ça sert ?.. La prière pourquoi faire ? » Contaminés, nous aurions peut-être tendance à ne plus savoir « perdre » du temps pour nous jeter comme le lépreux aux pieds du Seigneur. « Je n’ai pas de temps à perdre ». J’imagine que les autres lépreux  étaient,  eux aussi, très pressés d’aller dire qu’ils étaient guéris, au point d’avoir oublié l’essentiel. Or l’essentiel, du moins pour celui qui est retourné sur ses pas, c’était de ressourcer sa foi et son amour auprès d’un visage, celui de Jésus de Nazareth. Et sans doute, il ne l’a pas oublié. Que Jésus soit pour nous, ce qu’il a été pour ce malade, ce visage qu’on ne peut jamais oublier.

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commentaires

D
Ce blog parle du pere gillot : http://dominicfrontier.blogspot.com/
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